L'histoire de France telle qu'elle m'a été contée.

La polémique autour du concert de Black M à l'occasion de la commémoration de la bataille de Verdun révèle surtout que la France doit connaître et assumer son histoire tout autant que l'héritage de tous ces français par le sang versé....



La guerre a été un sujet maintes fois abordé pendant mon enfance.

Du coté maternelle, elle a coûté très cher. Mon grand père maternel, officier de cavalerie n'a pas survécu à son séjour en camp allemand. Maman s’est retrouvé orpheline, ma grand mère, grande bourgeoise qui avait épousé un officier de cavalerie aristocrate, s'est retrouvée veuve pour les 50 années qu'elle avait encore à vivre. Saint Cyrien, il a combattu dans le Rif ou il reçu ses premières blessures. A l’école de guerre en 1936, il croisa le colonel De Gaulle. Comme beaucoup d'officiers de sa génération il n'éprouva aucune sympathie pour celui qui à leurs yeux était déjà plus un politique qu'un soldat. On avait de l'affection et de l'admiration pour les vainqueurs de la 1ère guerre mondiale, Gallieni, Joffre, Foch, Petain... La seconde guerre mondiale laissa trop de morts. Ma grand mère, ma mère et le reste de la famille avaient enterré trop des leurs pour une période que je comprenais plus trouble qu'on me l'enseigna à l'école.


Du coté paternel, Mon arrière grand père l'amiral Muselier, avait commencé sa carrière d'officier de marine avec les guerres de l'opium. Il en garda le goût toute sa vie. Fusiller marin, il s'illustre pendant la grande guerre et continue le combat en portant secours à l'armée blanche sur les cotes de l'Ukraine. Après de nombreux commandements il est nommé vice-amiral le 9 octobre 1939 mais mis à la retraite par mesure disciplinaire par Darlan le 21 novembre suivant. Alors que la France conclue une armistice, il part à Londres continuer le combat. Il y créa les Forces Navales Françaises Libres et leur donna la croix de sa Lorraine natale. Comme beaucoup d'officiers supérieurs à Londres, il est en désaccord avec De Gaulle. Soutenu par les anglais, il est anobli. Lui, l'ami de Mendes France, perdit le combat politique face à son rival. Il écrivit De Gaulle contre le Gaullisme en 1946. Ses archives furent confisquées et détruites à sa mort.


Mon grand père paternel était issu d'un milieu à la fois très simple et très humble. Orphelin très jeune il devient enfant de troupe. L'armée et les lycées militaires lui permettent de devenir polytechnicien. A sa sortie il choisit la marine. Car il aimait les voyages me dit il. Affecté à Tunis, il tombe sous le charme de la fille de l'amiral Muselier. Les deux hommes se rencontrent, L'amiral apprécie le chemin parcouru, le mariage est célébré, mon père naquit quelques années plus tard dans la propriété familiale en Auvergne.
La 2nde guerre mondiale éclate, il suit son beau père à Londres et participe à la création et aux combats des forces navales françaises libres. Pendant 5 ans mes grands parents ne purent se voir. ma grand mère me parla beaucoup de cette période ou fille et épouse de "déserteurs" elle du se débrouiller seule. Mon grand père rentra, mais du repartir rapidement : l'Indochine. Il en revint, en vie, mais sur un brancard. Il acheva alors sa carrière amiral, sur le lit d'un hôpital militaire...
Il quitte l'armée et enseigne les mathématiques à l'université de Clermont Ferrand. Homme discret il n'aimait pas la politique. Il me parla de De Gaulle, père et fils, de son beau père et des jeux de pouvoir et des trahisons qu'ils entraînent pour ceux qui se croient supérieurs.
Homme de sciences et de lettres, il étudia jusqu'à ses dernières années. Sur son lit de mort, il eu le soucis de me soutenir dans ma première entreprise. Ma grand mère l'assista d'un amour si fort qu'elle le suivit peu de temps après son départ.


Mon père intégrait Saint Cyr avec la promotion Terre d'Afrique à la même époque. Comme beaucoup de ses camarades, à peine sorti d'école, il parti en Algérie, on lui confia une Harka. Militairement ils gagnèrent cette guerre appelée alors "événements d'Algérie". Mais la bataille politique fut perdue, ce fut ce que beaucoup vécurent comme un abandon :  L'indépendance de l'Algérie. Avec son million de rapatriés, ses soldats trahis car ils n’étaient pas européens. Les harkis qui avaient, à de nombreuses reprises, sauvé la vie de mon père, soldats français, étaient désarmés par la gendarmerie française et abandonnés à leurs ennemis de la veille. Tout cela se fit sur ordre de celui qui avait pris, à l'appel de l'armée, le pouvoir en 1958. Mon père sorti meurtri de la trahison de la France envers sa troupe. Il m'en parle peu, comme tous les hommes qui vécurent cette trahison. Il eut la présence d'esprit de m'expliquer que ses combats n'étaient pas les miens. Que je devais vivre dans mon époque, il su me faire aimer le Magreb et ses différences. Il poursuivi sa carrière militaire en Afrique tant qu'il le pu. Mon frère aîné Bruno, naquit à Dakar quatre ans après l'indépendance.
Il permit à mon 2 ème frère et moi de rentrer au quartier Gallieni du Prytanée militaire de la Flèche. Cette belle institution me donnait mes meilleurs amis alors que lui était au Liban avec les casques bleus.


L'histoire de France, de Gallieni à la décolonisation m'a été transmise par ma famille. Il est indéniable que c'est elle qui m'a appris à aimer mon pays, à accepter ses contradictions et me fortifier de sa diversité. La France est la résultante d'une histoire aussi riche que tumultueuse.

Les français d'origine algérienne, marocaine, sénégalaise, ivoirienne ne sont pas à mes yeux des immigrés, ils sont pour moi le fruit de notre histoire commune, tout comme ceux d'origine bretonne, corse, alsacienne ou du conté de Nice.

Aujourd'hui dans la continuité de cette histoire, je suis au Maroc, comme mon grand père y était il y a 85 ans. Je suis content d'y favoriser les échanges entre l'Europe et l'Afrique là ou lui combattait dans le Rif.



Il n'existe pas à mes yeux des français de souche. Parlons de français d'origine bretonne, basque, corse, vendéenne, savoyarde, algérienne, sénégalaise, haïtienne, antillaise, maorie, indienne de Pondichery, si vraiment vous voulez faire ressortir certaines spécificités régionales mais n'oublions jamais que nous avons tous un bien commun : La France.

Il est temps que nous apprenions à nos enfants l'histoire de France et par là même rappeler le pacte national qui nous lie : Liberté, Egalité, Fraternité.  Je n'ai, pour ceux qui cherchent à diviser les français en fonction de leurs origines ou de leur religion, que mépris et dédain.

Si la Gaule fait partie de la France, la France ne se résume pas à la Gaule, beaucoup de chemin a été parcouru depuis 2000 ans.


Comptez sur moi pour toujours rappeler ce qui nous unit et ne jamais chercher à diviser notre communauté nationale sur des considérations d'ordre privé.